Roger Frézin - C'est beau l'aube - 1965 |
Roger Frézin - Le pare-feu - 1965 |
Roger Frézin - Champmajour - 1966 |
Roger Frézin - Oniric Mecanic - 1967 |
Dehors il y a les voitures qui klaxonnent, les embouteillages, la ville fendue de toutes parts, un chat traverse la rue, hautain, il sait où il va, saute par dessus la petite barrière de bois, des enfants courent le long du trottoir
et puis il y a la peinture de Roger Frézin, grouillante de pensées contradictoires, immobile sur le mur
Peut-être que la nuit commence à tomber, les lumières clignotent comme si elles hésitaient puis, finalement, se décident pour la fixité, des piétons sortent des immeubles décidés à entrer dans leurs souvenirs, dans leurs projets du soir, comme s’ils changeaient de direction, quelques-uns poussent la porte du bar de la grand-place, on entend l’indistinct brouhaha surgissant de l’intérieur
il y a la peinture de Roger Frézin qui, dans le secret de ses images joyeuses, tient tête à la rue, complice et pourtant étrangère
Dehors on entend des rires, des cris, des éclats de voix, une femme chante, apostrophe les passants sans guère se soucier de leurs réactions, un couple passe bras dessus bras dessous, ils sourient à la lumière, la femme est radieuse, l’homme paraît pressé, peut-être est-il en train d’imaginer le prochain plan du film qu’il tourne dans sa tête depuis si longtemps, on dirait que la ville est tout entière condensée dans leurs yeux
il y a la peinture de Roger Frézin qui se fraie un chemin vers le bonheur comme si le désordre apparent n’était que le masque d’un ordre supérieur
Des portières claquent, des moteurs continuent de tourner ou se taisent subitement, on dirait que la pluie menace au milieu des premières étoiles, c’est la ville qui mugit, animal indompté des désirs de chacun, des romances perdues, des rendez-vous manqués, pendant que les cafés sont pleins maintenant, un jeune homme écrit solitaire sur un coin de table, il attend une phrase qui devrait venir, qu’il ne connaît pas, que peut-être il croisera sans la reconnaître, il se dit que la ville est un poème dont il n’est pas si simple de trouver la porte d’entrée, il se dit que la ville est un poème sans clé
il y a la peinture de Roger Frézin qui fait surgir la mer là où personne ne la voit, là où un escalier donne directement sur le ciel.
février 2017
Pierre Vandrepote
Roger Frézin - Autoportrait du monde - 1967 Collection particulière |
Roger Frézin en 1992
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